Une majorité des Français se disent “mécontents” de l’action de François Hollande. Un résultat bien médiocre, qui montre l’ampleur de la crise de confiance politique qui traverse la France.
Pour la première fois une élection présidentielle n’a pas été suivie d’état de grâce, et le nouveau Président est déjà confronté après 100 jours à une opinion mitigée à son égard. On peut toujours discuter et débattre pour savoir s’il est à tel ou tel niveau, si cela est justifié ou non, en réalité la question n’est pas là. La question n’est pas « personnelle ». Ce que nous vivons est une profonde crise politique, une crise de confiance politique, qui n’est plus de la défiance ou de la critique mais un grand scepticisme, une difficulté à y croire, à être convaincu de l’impact de l’action politique, de sa capacité à agir sur les choses, et surtout sur mon quotidien de citoyen, de consommateur, de salarié, d’entrepreneur, de fonctionnaire, de retraité, etc.
Souvenez-vous de l’été 2012 et de cette tentative de contrôle du prix de l’essence. L’Etat a perdu de l’argent et sa crédibilité à tenter, seul au monde, de contenir le prix d’un bien mondialisé … sans toucher aux trois quarts de taxes de la composante du prix dont il est maitre. Un épisode malheureux qui n’est par ailleurs que la chronique d’une impuissance annoncée tant personne n’était dupe dès les premières intentions formulées sur cette affaire du prix de l’essence. L’autre épisode récurrent concerne bien sûr l’évolution négative des chiffres du chômage commentée chaque mois de façon certes réaliste et combative certes mais également fataliste et incantatoire (“la courbe s’inversera” … oui, nécessairement, tôt ou tard, sans doute tard d’ailleurs).
Ces derniers épisodes ne sont que le dernier wagon d’un long train d’inquiétudes et de désillusions. Les Français voient bien l’enlisement de l’Europe dans la crise de l’euro et sa succession de sommets déterminants de la dernière chance qui ne font pourtant qu’annoncer les suivants ; une Grèce criblée de dettes dont la faillite est devenue permanente comme on vit avec une maladie chronique ; l’urgence des questions environnementales et leur série de conférences mondiales stériles ; le surendettement chronique des Etats piégés dans leur addiction à la dépense publique ; etc.
Ces enjeux sont de plus en plus exposés, traités médiatiquement, voire mis en scène, mais ne connaissent pourtant jamais d’épilogues. Ce n’est donc pas une affaire « personnelle », mais bien une question qui touche à la crédibilité de l’action politique. Nicolas Sarkozy en France et Barack Obama aux Etats-Unis incarnaient tous les deux en 2007 et 2008 un nouveau souffle, un nouvel espoir, une énergie politique à qui rien ne semblait résister. Même s’il faut honnêtement accorder du crédit à certains aspects de leur action politique il n’en demeure pas moins que « même eux » n’ont pas réussis à contrer la conjoncture. Il en a résulté en France une élection présidentielle 2012 de rejet davantage que de projet, sans véritable enthousiasme, sans réelle ferveur, même à l’annonce des résultats après ce qui était pourtant une réelle alternance politique.
Face à ce nouveau pouvoir sans doute élu sans forte conviction, l’opposition est atone. L’UMP recherche certes un leader, mais c’est l’arbre qui cache la forêt. Le véritable défi de l’UMP est davantage de retrouver un projet et d’être audible pour apporter des solutions à des enjeux qu’elle n’a pas complément résolu ces dernières années. Face à cette crise politique, cette dépression politique, tous les acteurs sont solidaires et concernés.
En conséquence le nouveau pouvoir politique a donc aujourd’hui tous les pouvoirs. Tous les pouvoirs, mais peu de cartes. Il cherche désespérément la carte feu vert ou increvable du mille bornes pour se défaire de la série d’obstacles que la vilaine conjoncture a posé sur sa route, qui entrave sa crédibilité, sa marge de manœuvre, sa confiance et qui le cloue inexorablement sur sa case. Il ne pourra pourtant passer son tour pendant 5 ans, ni attendre la veine d’une bonne pioche … « ah ça y est, la carte 2% de croissance, je roule » !
A court terme, il faut bien sûr souhaiter, espérer et forcer ce coup de pouce de la providence, qui ne viendra plus de l’Etat. Mais sans doute faut-il raisonnablement et simultanément à la pédagogie des difficultés actuelles, se projeter vers l’avenir, construire des alternatives viables. Parler par exemple de profonde mutation énergétique et technologique plutôt que de baisse artificielle et éphémère du prix de l’essence.